Le blouson de cuir, de Maxence Amiel

… qui porte sur son dos le temps

et ne peut disparaître

c’est un rôle que je tiens en portant le blouson

le rôle du temps qui marche et ne s’arrête pas

c’est un relai de générations

et de questions

et de bonheurs et

de quelques malheurs

il y a des trous et des pliures qui font hurler le cuir

mais qui ne peuvent s’éteindre :

la peau la chemise le nez enregistrent

les échos

qui passent par les poches

et passent par le noir et passent par le reste

le corps qui se cachait père de ma mère sous

l’épaisse carapace

et c’est moi qui agite maintenant le bras dur

et remonte le col

et qui remue les ans sur mon dos de jeune homme

pensant dans les rues froides à cet autre jeune homme

qui chuchote sans doute au fond des ombres loin

et me porte avec lui dans sa grande nuit fantôme

on dit souvent cela : qu’il faudrait le jeter

que le blouson est vieux

que le blouson est laid

que le blouson fatigue

mais je sais que les heures ne fatiguent jamais

sur les épaules suivantes

qui accusent le don

Maxence Amiel

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